∏OÙ ? ∏ÓTE ?
(Où ? Quand ?)
A propos de l’œuvre de Katerina Samara (Grèce) : va te faire foutre !
Qui a défait ce lit-là ?
Sans lui faire offense.
Qui a coiffé Hortense
de ce bleu-là ?
De la guimauve,
cette ecchymose
bleu hortensia
Elle se rêvait, Delphine,
d’un rose delphinidine définitif
qui fila, mauvais bas, mauvais coup,
ailleurs
Mais vers où ?
Tout est fermé à cette heure
et c’est pas ces fleurs
qui pourront rien changer
Etranges Hydrangés ce bleu qui vire au rose
Etranges et bien rangés dans l’ombre et le morose
Etranges alignés sur les lignes de failles
où détalent et filent
les pieds nus hémophiles
sur rocaille aiguisée
Mais les montagnes n’ont pas qu’une seule Crête
Ce chemin n’est pas fil, c’est un sentier infime
C’est un réseau, une bobine
Qui a laissé le chat jouer avec ?
On voudrait une ligne, claire et nette
On voudrait un dessin, un truc au fusain, et qu’on n’y revienne plus
On voudrait s’y retrouver, quoi
Mais d’abord s’y trouver. Pour se reperdre ensuite
Va falloir du temps pour débroussailler l’embrouille
pour démêler mélasse et rafistoler,
systole diastole,
la bonne vieille tôle qui sert de peau
Il faudrait, oui, devenir invisible. Ne laisser parler que les fils
S’asseoir, souffler, retrouver là, son haleine perdue
Ouvrir la boite noire des rêves en bleu et jaune
Tiens des fauteuils !
C’est bon pour la fesse et l’œil
Laisser les fils parler des filles
Laisser les fils parler des fisss[2]
Laisser le regard, lui, courir
Il a encore, le gaillard, de la force
Et regarder passer, attention poussez-vous, les fils de l’avenir
Oh non, ces fils-là ne font pas tapisserie
Les écouter
Ils racontent ce qui s’est dit et fait
Et les histoires, les prophéties, fais ci fais ça,
et les sentiers battus à plates coutures à coups de destins sûrs
tracés
A toi d’entendre
Rester assise attendre
Le fil se tend se brise
Ce fil comme un chemin
A prendre ou à regarder
à prendre ou à baiser
à prendre ou à laisser passer
Un pont de fil, de cordes, prenant vents et secousses,
suspendu entre rien et rien
Ou entre deux possibles
Mais si, ce fil, je coupe, il en devient deux bouts
et j’ai l’air fine en mon fauteuil vautrée
C’est un Hydre à têtes chercheuses et tumultueuses, ce fil
Il court, furet du temps, où va-t-il se fourrer ?
Il court sur les murs, une araignée folle, échappée du formol
Il dessine le réseau du passé à venir, de l’avenir à repasser
Le fer de la mémoire défroissera tout ça
Là où se faufilent les faux plis des fustanelles
qui te rappellent qui te souviennent
qui te retiennent qui te soutiennent
Dessiner les ombres, ça se peut, avec un fil ?
A toi de voir
Une fois fixé sur un mur, tout ça reste immobile
Comme la mémoire, ça fait photo
Le destin c’est jaunir
C’est de l’argentique au soleil d’or du temps.
S’argenter, de cheveux et de souvenirs. Jusqu’à…jusqu’à…
Oui, j’aimerais mourir si on peut aimer ça
On ne peut pas l’éviter ?
Alors autant se dire qu’on aimerait ça, mourir
Alors, un jour. Un jour ou deux. Une semaine, une décennie. Pas aujourd’hui.
Et savoir enfin où mènent les fils, quand ils finissent de se broder
Et savoir enfin où prendre sa place dans l’embrouillamini des mémoires qui se donnent des airs de traces
Alors oui me voilà arrivée, assise. Et quelqu’un me crie quelque chose
Une fin de non-recevoir ? Un début ? Une bénédiction ?
Un regard amusé qui me voit grandir ?
Un baiser dernier qui me voit m’essouffler ?
Finir
Finir par être la tension du fil
Finir par être l’invisible
Va te faire foutre !
D’accord. Mais où ?
Michel Bellier
[1] Prononcer Pou, Poté
[2] Prononcer fiss, comme dans fils prodigue
Montaigne, Shakespeare, Avron et nous
en hommage à Philippe Avron, dont la mort survint brutalement pendant le festival d’Avignon 2010
Il y a des rentrées où on voudrait vraiment faire autre chose que rendre hommage à la mémoire de quelqu’un. On voudrait simplement lever nos verres, célébrer la beauté de la vie et trinquer à son éphémère saveur en regardant l’automne s’installer. Il y a des moments dans la vie où on se demande si il n’y a pas des périodes, des lieux plus maudits que d’autres.
En septembre 2009, nous rendions hommage au créateur du festival off d’Avignon, le si frileusement snobé André Benedetto. Cette année : re rentrée, re septembre, et c’est à Philippe Avron que nous portons un dernier toast.
Souffle Meltemi !
Article 122 paragraphe 2 du traité de Lisbonne
« Lorsqu’un Etat membre connaît des difficultés ou une menace sérieuse de graves difficultés, en raison de catastrophes naturelles ou d’événements exceptionnels échappant à son contrôle, le Conseil, sur proposition de la Commission, peut accorder, sous certaines conditions, une assistance financière de l’Union à l’Etat membre concerné. »
« Cet article est, dans son esprit, manifestement orienté vers les catastrophes naturelles: incendies, tempêtes, tremblements de terre… Mais certains considèrent qu’on pourrait l’invoquer dans le cas de la Grèce pour surmonter l’interdiction prévue dans un autre article du traité et fournir une base juridique à une aide financière européenne. »
Commentaire d’un économiste à propos de la crise grecque
J’arrête ma vieille Yugo de location au sommet de la côte. Elle n’a plus de frein à main depuis longtemps, alors je glisse une pierre sous le pneu arrière-gauche…
L’Asie aux yeux bleux
À Burcu Çelik et Erdal Eksert
Savez-vous pourquoi la Mer Noire s’appelle la Mer Noire ? Certaines légendes disent que c’est parce qu’elle porte le deuil des marins qui l’ont traversé. D’autres affirment qu’elle s’est teinte du désespoir des révoltés qui s’y sont perdus. D’autres prétendent encore qu’elle est si profonde que le ciel a rebroussé chemin et ne veut s’y mirer. Vous trouverez mille et une explications, toutes différentes les unes des autres. Que voulez-vous, les légendes c’est comme ça. La vérité est toute autre….